Jusqu'à Remy de Gourmont, personne ne connaissait Théophile, personne ne connaissait Rivarol (Benjamin Fondane).


Collection des plus belles pages, petit in-16, Mercure de France, 1907 (préface)

Apparition signalée dans le Mercure de France du 1er juin 1907, p. 56

Nota bene : Cette préface (moins les deux derniers paragraphes) est parue dans la troisième série des Promenades littéraires sous le titre de « Théophile, poète romantique ». Dans ces mêmes Promenades, on peut lire : « Théophile et les Jésuites ».

ll a un autre mérite, et qui n'est pas médiocre, ajouté aux autres. Théophile fut un libre esprit, de la lignée des indisciplinés et des incrédules. Elle remonte loin, dans la littérature française, jusqu'au XIIIe siècle, et peut-être plus haut. L'auteur d'Aucassin et Nicolette raille le paradis où ne vont que nonnes et vieux prêtres et toutes vilaines gens qui passent leur temps accroupis devant les autels ; il veut aller en enfer, où vont les beaux clercs et les cavaliers, les belles dames courtoises avec leurs barons. C'est sans doute ce que répondit Théophile au curé de Saint-Nicolas, qui s'en courrouça. Il était païen de ce paganisme admirable qui exige que l'on vive sa vie, avant tout. Bientôt va commencer la grande littérature soumise au clergé, pendant laquelle Molière presque seul représente l'intelligence affranchie. C'est dans Théophile et dans Cyrano, plus que dans l'équivoque Gassendi, que Molière avait puisé sa philosophie. On n'est pas un esprit secondaire, quand on prépare la venue de plus grands esprits que soi. Théophile est un de ceux qui ont maintenu le flambeau allumé. Des gouttes de cire brûlante sont tombées sur sa main : c'est pour cela qu'elle tremble un peu (R. G.).

Echos

Jean de Gourmont, « Littérature. Théophile, avec une notice de Remy de Gourmont », Mercure de France, 1er juillet 1907, p. 128-129