Dans cette rubrique figureront les articles, les ouvrages, etc., où, en raison du sujet abordé, le nom de Remy de Gourmont devrait apparaître. Il peut être omis sciemment (l'auteur mérite le pilori) ; par ignorance (l'auteur mérite le bonnet d'âne) ; par distraction (l'auteur est une tête de linotte). L'accusé, mort ou vif, bénéficie, au nom de la gaie ignorance, d'un droit de réponse, que nous publierons volontiers. Deux exemples :

Félix Fénéon mérite plutôt le pilori. Dans le numéro 29 du Crapouillot consacré, en 1955, à « la Belle Epoque », s'il s'inclut dans son « Bottin des Lettres et des Arts » qui comprend environ cent quarante entrées, il ignore superbement l'auteur du Livre des masques... Qui veut prendre la défense de Félix Fénéon ou confirmer qu'il mérite bien le pilori. A-t-il des raisons légitimes, illégitimes de le passer ainsi sous silence ?

Défense de Félix Fénéon : c'est l'auteur de cette rubrique qui mérite le bonnet d'âne. Félix Fénéon est mort en 1944 et son Petit Bottin date de 1886. Il ne pouvait donc y évoquer Gourmont, qui n'était que l'auteur de Merlette.

Philippe Sollers mérite plutôt le bonnet d'âne. Dans le Monde du vendredi 20 novembre 1992, compte rendant d'une biographie d'Ezra Pound (Humphrey Carpenter, Ezra Pound, Belfond), il ne mentionne pas Remy de Gourmont et son influence sur Pound. Circonstances atténuantes (?) : peut-être le biographe ne mentionne-t-il pas Gourmont ou superficiellement. Heureusement, dans ce même numéro, toujours à propos de Pound et d'un de ses livres, Henri Gaudier-Brzeska (Ed. Tristram), Philippe Dagen cite Pound citant Gourmont et note que « Remy de Gourmont fut le seul critique français à signaler et à déplorer la mort de Gaudier ce qui ne devrait pas surprendre, étant donné que Gourmont fut l'un des esprits les plus tranchants de l'époque et, par conséquent, l'un des plus oubliés désormais ». A le lire mensuellement dans le Journal du dimanche, Philippe Sollers ne tranche guère.

Défense de Philippe Sollers :


Vos contributions, pour enrichir cette rubrique, comme les autres, sont les bienvenues. Les accessit, premiers prix, prix d'excellence et autres satisfecit ne sont pas interdits.


DERNIER BONNET D'ANE :

Bonnet d'ânesse pour Christine Jordis qui, dans « Justice pour T. S. Eliot », Le Monde, vendredi 28 février 2003, mentionne les noms de Mallarmé, Valéry, Rimbaud, Corbière, Maeterlinck, Laforgue, Pound, mais ignore Gourmont, dont Eliot disait :

Of all modern critics, perhaps Remy de Gourmont had most of the general intelligence of Aristotle (« The perfect critic », The Sacred Wood : Essays on Poetry and Criticism,1922).

Evidemment si Gourmont, « the critical consciousness of a generation » (toujours selon Eliot) n'apparaît pas dans l'ouvrage de Stéphane Giocanti (T. S. Eliot, ou le Monde en poussières, J.-C. Lattès) dont il est compte rendu , Christine Jordis a partiellement droit à nos plus à peine plates excuses.

J'avais cru voir un compte rendu du même ouvrage dans Le Figaro littéraire, mais je n'arrive pas à remettre les yeux dessus. Si quelqu'un peut confirmer ou infirmer...


Michel Bée mérite le bonnet d'âne. Le communiqué suivant paru dans la rubrique Quoi de neuf ? explique pourquoi :

Aujourd'hui, 6 décembre, 18h 30, grand salon de l'Hôtel de Ville de Coutances, soirée de lancement du Livre du Pou, fac-similé du manuscrit original, écrit et dessiné par les artistes coutançais du Pou qui grimpe. On regrettera que dans le livret d'accompagnement ait été commis un article intitulé « Revue de deux mondes : le paysage culturel en France de 1910 à 1930 », dans lequel le nom de Gourmont (inventeur, je crois, de la métaphore du paysage) n'apparaît pas. Mithridatisé contre l'ignorance crasse des compilateurs d'énième main, je n'aurais pas réagi, si la belle équipe du Pou Qui Grimpe n'avait pas organisé les grandes fêtes de l'inauguration du buste de Remy de Gourmont et réédité la Petite Ville . Cela maudit, le Livre du Pou mérite hautement qu'on se le procure en s'adressant à Tourisme et culture en pays de Coutances (02.33.19.08.10 / tourisme-coutances@wanadoo.fr ).


Albine Novarino, mérite un bonnet d'âne, et c'est dommage, car son édition des Contes et histoires de Normandie de Charles Frémine, Pocket 2001, a le mérite d'exister et j'ai été agréablement surpris de la découvrir. Mais enfin consacrer une rubrique au « Cotentin en littérature » sans mentionner un Gourmont : Merlette, Le Songe d'une femme, Un cœur virginal ou la Petite ville ; ne retenir de La Varende que Pays d'Ouche (certes l'auteur signale que certains ouvrages concernent plus généralement la Normandie), alors qu'il y avait L'Homme aux gants de toile et surtout la prodigieuse « Fugue » des Manants du roi, c'est se moquer.


Pilori ou bonnet d'âne pour Jérôme Carcopino, de l'Académie française, qui ignore Gourmont dans « Ce que la littérature française doit à la Normandie », Etudes normandes, n° 204, 1968 ? S'il est question de Geffosses, il s'agit de la « ferme de Geffosses, près de Pont-l'Evêque, que possédaient ses grands-parents et où il [Flaubert] a planté le décor du plus ému de ses récits [Un cœur simple] ».

Reste à savoir si « le remarquable Guide littéraire que nous devons à [son] confrère Lebègue » et auquel il se réfère, mentionne ou non Gourmont.


Bonnet d'âne pour Georges Poisson qui, dans Présences littéraires en Basse-Normandie et dans les Iles Anglo-normandes, Centre régional des lettres de Basse-Normandie, Editions Isoète, 1998, ignore Gourmont et La Varende.

« Plus au nord, c'est Coutances, où Fernand Fleuret fut élève du lycée, dont il fut rapidement exclu, manifestant déjà l'anticonformisme qui fera le succès de la Bienheureuse Raton, fille de joie. L'établissement a-t-il gravé le nom de l'écrivain sur une plaque de marbre ? »

Non l'établissement n'a pas gravé le nom de Fernand Fleuret, ni celui de Remy de Gourmont, qui ne fut pas exclu, collectionna les prix, tout en manifestant déjà son anticonformisme :

« Intelligence facile, distinguée, mais qu'il ne peut apprendre à diriger. Il fait un peu trop d'excursions dans le champ de la fantaisie. Qu'il fasse d'abord une bonne rhétorique ; plus tard, il travaillera suivant ses goûts », écrit de lui son proviseur, l'abbé Lair.


Pilori pour Jean de La Varende qui parcourt la Normandie sans rencontrer Gourmont : En parcourant la Normandie, Les Flots-Bleus, Monte-Carlo, 1953.


Bonnet d'âne pour Philippe-Jean Catinchi qui, dans « Schwob ou l'art de bâtir entre les lignes », Le Monde, vendredi 10 janvier 2003, écrit : « Le passionnant collectif que propose Champ Vallon croise une captivante galerie de portraits de Schwob par ses contemporains, de Léautaud à Apollinaire ou Henri de Régnier, des lectures de ses textes par les anciens (Léon Blum, Gide, Maeterlinck...) ». Evidemment si Gourmont n'apparaît pas dans l'ouvrage cité, Philippe-Jean Catinchi a partiellement droit à nos plus à peine plates excuses.