« Le Symbolisme et les revues » in le catalogue de l'exposition du Cinquantenaire du Symbolisme, Éditions des Bibliothèques Nationales, 1936

A la fin de 1889, le petit groupe d'écrivains de la Pléiade décidait de créer une revue plus importante, ouverte à tous les auteurs de talent, français et étrangers. Il comprenait Alfred Vallette, Louis Dumur, Albert Samain, Louis Denise, Ernest Raynaud, Albert Aurier, Jean Court, Rachilde, Julien Leclercq et Édouard Dubus.

Au cours des réunions préparatoires qui se tinrent chez Jules Renard, présenté par son ami Ernest Raynaud, Édouard Dubus fit prévaloir comme titre de la future revue, le Mercure de France. Alfred Vallette en fut le directeur et l'administrateur ; le premier fascicule du Mercure de France parut en janvier 1890. Ses bureaux furent installés dans un modeste immeuble, 15, rue de l'Échaudé.

Au cours de cette année 1890, de nouveaux collaborateurs rallièrent la jeune revue : Remy de Gourmont, Laurent Tailhade, qui devait y publier, sous le pseudonyme de Dom Juniperien, tant d’articles violents, Saint-Pol-Roux, Morice, Roinard, P. Quillard, Herold, A. Fontainas, etc.

Toute la génération symboliste devait d'ailleurs collaborer au Mercure. Très éclectique, ouverte à tous les talents, quelle que fût leur école ou leur nationalité, donnant parfois, outre de nombreuses traductions d'auteurs étrangers, des textes originaux allemands, anglais, scandinaves, etc., le Mercure de France allait s'efforcer de devenir l'instrument de culture intellectuelle qu'il n'a cessé d’être depuis lors sous l'habile et sage direction d'Alfred Vallette.

« Le Mercure de France, dont l'indépendance en art, en littérature, en morale, fut parfois si sévèrement jugée par la presse, n'a aucun rapport, même matériel, avec les revues littéraires ou les publications artistiques pour ainsi dire officielles, toutes édifiées selon un même modèle convenu... Il traite volontiers les sujets rigoureusement exclus de ces périodiques surannés, respectueux par snobisme de tant d'idées caduques et de tant de personnalités surfaites et, pas plus qu'à celle de la chose, il ne se croit tenu à l'hypocrisie de la langue et du mot. Le Mercure de France offre un tableau complet du mouvement littéraire et artistique nouveau. Il n'omet aucune des tentatives intéressantes qui se produisent en littérature, au théâtre, en peinture, en sculpture, en musique, et il restera l'un des plus précieux documents pour l'historien de l'évolution intellectuelle et esthétique qui commence à l'agonie du Parnasse et du Naturalisme. »

C'est pour remplir ce programme extrait d'une annonce de 1893, que le Mercure de France créa différentes rubriques confiées chacune à un seul rédadeur, sous le titre de Revue du mois, puis Revue de la Quinzaine.

D'abord publié grâce aux participations de ses fondateurs, le Mercure, qui s'était, dès 1893, adjoint une librairie, s'est transformé en société anonyme en 1894. Il a quitté la rue de l'Échaudé pour s'installer dans l'immeuble bien connu du 26, rue de Condé, où est mort son fondateur en 1935.