Pour moi, j'en suis arrivé à presque trouver ridicule un homme qui ne revêt pas la robe pour rester chez soi. Je ne me conçois pas autrement vêtu quand je m'assieds pour écrire et même je ne m'astreins au costume masculin que quand je dois sortir ou recevoir des gens sans familiarité. Ce n'est pas une robe de chez Paquin. Non, c'est la robe du treizième siècle, souple, ample et drapée. Quand la mode me permettra-t-elle de sortir ainsi ? Je suis sans espérance (La robe).

A mon coup de sonnette, rien ne bougea. Enfin la porte s'entr'ouvrit à peine et, coiffé d'une petite calotte, parut un homme trapu, en tricot bleu usé, qui me considérait d'un œil soupçonneux (E. Deverin).

Invitée par le maître, j'allais villa Saïd où Anatole France recevait, le dimanche matin. Il se tenait dans sa bibliothèque ; je ne parlerai pas de sa robe de chambre, il est connu que les hommes de Lettres notoires la revêtent avec ostentation depuis Voltaire et Diderot en passant par Balzac et Gourmont. (E. de Gramont)

La maladie le disgracia, et quand je le connus il n'était à son relatif avantage que chez lui, dans la demi-obscurité de son cabinet de travail où on le trouvait vêtu d'une robe de bure ; ce costume de moine lui plaisait et c'est ainsi qu'il s'est laissé crayonner ou photographier. Il avait en effet beaucoup du moine : la sauvagerie et la misanthropie d'abord, et ensuite le très haut idéal de vie laborieuse et idéaliste, le mépris des richesses, et même du confortable, la franchise intransigeante, parfois cynique ; et encore, comme chez les mauvais moines, la sécheresse, l'orgueil et la luxure. (H. Mazel)

Remy de Gourmont

Vêtu d'une robe qui avait l'air d'une bure, il ressemblait à un vieux capucin qui porte binocle, mais un capucin studieux et avec cela boitant un peu et bégayant toujours. [...] Comme je lui parlais de son costume à lui, Gourmont reprit : "Toutes les robes de chambre ressemblent à des robes monacales." (Journal de l'abbé Mugnier, note du 10 mai 1915)

Il y a plus de vingt ans, lorsqu'on parlait de Gourmont, l'on prétendait qu'il vivait retiré et n'ouvrait qu'un petit guichet à de rares visiteurs, qui ne l'apercevaient qu'à peine dans la pénombre; qu'il laissait passer une belle main ornée d'une améthyste épiscopale, et qu'il était revêtu d'une soutane violette. Légende ! Elle cadrait pourtant avec une partie de son œuvre, Les Saintes du Paradis, Lilith, Théodat et le Latin Mystique, et il a écrit qu'il aurait voulu être un prélat de la Renaissance, dans une petite cour d'Italie. Il portait, cependant, une robe de camaldule et une petite calotte ecclésiastique, tout ce qui lui restait de la religion, dont il avait aimé, les hymnes, les églises et les rites. (F. Fleuret)

Sa vie est une vie de solitude et de pensée. Le mal qui l'a défiguré, et dont son visage porte les traces, l'a isolé dans une docte et sévère retraite Il sort peu de son logis de la rue des Saints-Pères. Après quelques visites aux libraires du quai, quelques promenades dans les rues tranquilles de son quartier, une brève apparition au Mercure, il rentre chez lui y retrouver ses livres, sa lampe de table, sa plume, son grand fauteuil. Il endosse sa robe de moine, pose une calotte ronde au sommet de sa tête. C'est l'heure où il reprend sa tâche interrompue et où il couvre de sa fine et très lisible écriture les feuilles de petit format dont il se sert. Il rature peu. Dans le silence qui l'entoure, il est tout à lui-même, aux jeux complexes de sa pensée toujours en éveil en sa merveilleuse activité. Remy de Gourmont est un grand écrivain. Il est notre Montaigne, notre Sainte-Beuve. Il est notre Gourmont (H. de Régnier).

Comme j'aurais aimé être évêque et en une moins moderne Rome, cardinal ! Si je m'appesantissais sur ce bien stérile désir, une sensation me prendrait à la gorge, de vie manquée, sensation vulgaire que mon orgueil repousse avec mépris. Et puis, ne les ai-je pas, à mon gré, goûtés, les mystiques bonheurs et les célestes angoisses de l'épiscopat ? N'ai-je point revêtu la robe violette relevée sur les bas pourpres ou traînante sur les marches de l'autel ? N'ai-je point gravi, mitre en tête, les degrés de la chaise présidiale ? De quoi donc me servirait la réalité, quand j'ai le rêve et la faculté de me protéiser, de posséder successivement toutes les formes de la vie, tous les états d'âme où l'homme se diversifie ? (Sixtine)